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Grand public

Les insectes: une menace majeure pour les sociétés humaines



Chaque année, les ravageurs ainsi que les maladies infectieuses provoquées par des virus, bactéries ou microorganismes eucaryotes pathogènes pour les h umains, les animaux et les plantes, causent plus de 12 Millions de victimes (source OMS) et des pertes de productions pouvant atteindre 40% à l’échelle mondiale. La situation empire avec l’expansion géographique des ravageurs et des maladies infectieuses en réponse au changement climatique et à la mondialisation des échanges. Les arthropodes, et notamment les insectes, prennent une place majeure dans ce patron global, agissant soit en tant que ravageurs, soit en tant que vecteurs. Un des challenges pour le bien-être actuel et futur des sociétés humaines concerne le contrôle de ces organismes. Malheureusement, les méthodes actuelles ne sont pas suffisamment efficaces et dépendent majoritairement sur l’utilisation massive de traitements chimiques non spécifiques qui impactent l’environnement et entrainent le développement de résistances. Le développement d’alternatives spécifiques pour combattre ces menaces est une nécessité. L’utilisation et le management de la biodiversité offrent des alternatives prometteuses mais restent pour l’instant balbutiantes et posent encore des questions de sécurité et de durabilité. Des programmes de recherches fondamentales et appliquées sont nécessaires pour développer des solutions innovantes pour le contrôle des ravageurs et des maladies infectieuses tout en diminuant l’usage des pesticides dans les programmes agronomiques et de santé.

L'émergence du concept holobionte

 
La biologie est actuellement en train de changer de paradigme. L’immense effort investi dans l’étude du microbiome humain a révélé que les pathogènes ne sont qu’une fraction des communautés de microorganismes hébergées par les animaux : les individus doivent être considérés comme des holobiontes, intégrant l’ensemble des organismes avec qui ils interagissent et avec qui ils forment un consortium symbiotique qui les constitue. La plupart des caractères doivent être considérés comme des phénotypes étendus : développement, digestion, immunité, reproduction sont affectés par ces interactions microbiennes. Cette vision holistique des individus et des pathosystèmes intégrant les sciences de l’environnement à la santé est maintenant requise. Ce changement de paradigme a conduit à de nouveaux champs disciplinaires comme l’écologie de la santé ou l’agroécologie, où l’interaction entre un hôte et un pathogène est replacée dans son contexte environnemental. Nos connaissances actuelles démontrent que l’utilisation de microorganismes ou de leurs produits est une direction prometteuse, mais largement sous exploitée, pour soutenir la production alimentaire ou combattre les ravageurs et les maladies infectieuses. La gestion des écosystèmes et le contrôle des ravageurs et des maladies requièrent l’étude des interactions entre de multiples partenaires (les hôtes, les vecteurs, les pathogènes, les symbiotes) et la compréhension des mécanismes qui sous-tendent ces interactions, du gène à l’écosystème.

Les insectes et leurs interactions intimes avec les microorganismes

Les insectes sont le groupe animal où la symbiose a été la mieux étudiée. De nombreux insectes hébergent des endosymbiotes primaires à transmission verticale obligatoires (symbiotes P), qui leur permettent d'exploiter des régimes déséquilibrés tels que le sang (par exemple les glossines, les punaises de lit) ou la sève du phloème (par exemple, les pucerons, les aleurodes) en fournissant des acides aminés essentiels et divers co-facteurs. La coévolution sur plus de cent millions d'années entre les symbiotes P et les hôtes a conduit à des interactions hautement intégrées sur le plan du développement, de la physiologie et du métabolisme. Les insectes sont également fréquemment infectés par d’autres symbiotes secondaires facultatifs héréditaires (symbiotes S). Les symbiotes S peuvent soit manipuler la reproduction de leurs insectes hôtes, soit offrir des avantages tels que l'exploitation de sources de nourriture particulières et la résistance à différents stress, notamment l'infection par des agents pathogènes. Les insectes hébergent également des microbiotes dont la transmission dépend davantage de l'environnement, notamment dans leur intestin, et qui participent à la digestion et à la protection contre les agents pathogènes. Ces microorganismes sont en train de devenir des cibles potentielles pour la mise au point de méthodes de lutte contre les insectes nuisibles (par exemple, des techniques de l'insecte incompatible) et les vecteurs (par exemple, la limitation de la compétence vectorielle en utilisant la bactérie Wolbachia).

MICRO-BE-HAVE : Comprendre et manipuler les interactions hôte-microbes

Des exemples spectaculaires de manipulations parasitaires et des découvertes récentes sur les symbiotes commensaux et mutualistes indiquent que les interactions hôte-microorganismes peuvent influer largement le comportement des hôtes. Ces observations ont des implications d'une grande portée, remettant en question le «libre arbitre» des individus, la valeur adaptative des comportements pour les différents partenaires de l'interaction et l'impact des symbiotes sur des processus aussi importants que l'isolement reproducteur et la spéciation ou l'épidémiologie des maladies infectieuses. Réciproquement, la manière dont les insectes utilisent les signaux microbiens pour adapter leur comportement est également un domaine émergent qui peut radicalement changer la façon dont nous pensons à l'environnement et à la manière dont le microbiote est transmis (par exemple, les individus choisissent-ils leur site de reproduction afin de maximiser les chances que leur la progéniture rencontre des microbes spécifiques?).
En réunissant cinq équipes internationalement reconnues de l'IDEXLyon dans les domaines des interactions insectes-microbes, de l'écologie comportementale et des sciences de l'ingénieur, Micro-Be-Have ambitionne d'apporter de nouvelles informations sur l'impact des microorganismes sur le comportement de l'hôte, afin d'éclairer le implications évolutives des interactions hôte-microbes chez les espèces animales. Micro-Be-Have ouvrira également la voie à l’identification de stratégies spécifiques axées sur l’écologie pour lutter contre les insectes ravageurs et pathogènes. En effet, alors que les méthodes de contrôle actuelles ciblent principalement des fonctions canoniques (système nerveux, intestin d'insectes, etc.), l'exploitation d'interactions insectes-microbes permettra d'identifier des microorganismes spécifiques ou des molécules dérivées de microbes afin de contrôler les populations d'insectes en perturbant les relations symbiotiques et en modifiant le comportement des insectes.
 

 

Microbehave organise le Cycle "Qui sommes-je ? Qui suis-nous ?" dans le cadre de L'Université Ouverte

Nous ne vivons pas isolés. Au contraire, nous respirons grâce à des bactéries logées dans nos cellules, digérons grâce à notre microbiote, et serions peut-être plus sujets à des accidents automobiles en cas d’infection par le toxoplasme ! Ce cycle de 4 conférences nous amènera à revisiter notre relation au monde microbien et notre propre individualité, entre conflit et coopération.  Rendez-vous à l'amphithéâtre de l'ENSSIB entre 17 et 19h.